La superficie agricole utilisée (SAU) correspond à la part du territoire dédiée aux activités agricoles. Elle représente plus de 40 % de la superficie wallonne, avec de faibles variations interannuelles. Le secteur de l'agriculture joue donc un rôle important dans le façonnement des paysages, la gestion des sols et la qualité de l’environnement.
Concentration des moyens de production
Entre 1990 et 2021, le nombre d’exploitations agricoles ou horticoles a diminué en Wallonie, passant de 29 178 exploitations à 12 728 exploitations, soit une réduction de 56,4 %[1]. Sur la même période, la SAU wallonne a peu évolué : de 752 743 ha en 1990, elle est passée à 740 623 ha en 2021 (- 1,6 %)[2]. Les exploitations n’ont donc cessé de s’agrandir. Entre 1990 et 2021, la superficie moyenne par exploitation a plus que doublé, passant de 25,8 ha à 58,2 ha. Parallèlement, le secteur a perdu plus de la moitié de ses travailleurs entre 1990 et 2016[3] : 46 076 pers versus 22 424 pers, une réduction associée à la diminution du nombre d'exploitations et l’intensification de la mécanisation(b). Le nombre de travailleurs par exploitation a quant à lui légèrement augmenté, passant de 1,58 pers/exploitation en 1990 à 1,74 pers/exploitation en 2016[3].
Des productions végétales avec un impact environnemental variable
En agriculture conventionnelle, les principales productions végétales peuvent être classées selon leur impact potentiel croissant sur l’environnement[4] : les prairies permanentes, les prairies temporaires, les céréales, le maïs, les betteraves et les pommes de terre. Différents facteurs contribuent à moduler cet impact :
- la couverture végétale est un facteur déterminant en termes de risque d’érosion par ruissellement[5] q. Les prairies se caractérisent ainsi par un risque de pertes en sol plus de 10 fois inférieur à celui des terres arables(d). Au niveau de celles-ci, le maïs et les pommes de terre présentent des risques plus élevés que la betterave ou le froment(c) ;
-
le reliquat de nitrate présent dans le sol en automne et susceptible d’être entrainé hors de la zone racinaire par les précipitations hivernales (mesuré via l’azote potentiellement lessivable ou APL(e)) influence le risque de pollution des eaux souterraines q. Les prairies présentent ainsi les valeurs d’APL les plus faibles. Elles sont suivies par les betteraves, puis par les céréales, le maïs et les pommes de terre q. À noter que le risque de pollution des eaux est également influencé par la rotation culturale[6], ainsi que par les pratiques agricoles (implantation éventuelle d’une CIPAN[7])(f) ;
- les quantités de substances actives de produits phytopharmaceutiques (PPP) utilisées varient selon les productions végétales, les cultures sarclées telles que les betteraves et les pommes de terre se caractérisant généralement par des apports en PPP plus élevés. En 2018, les doses de substances actives de PPP appliquées en Wallonie sur les prairies permanentes s’élevaient en moyenne à 0,04 kg/ha, contre 2,8 kg/ha pour le froment d’hiver, 6,2 kg/ha pour les betteraves sucrières et 15,6 kg/ha en culture de pommes de terre q.
Les prairies permanentes et le froment d’hiver dominent
En 2021, les prairies permanentes représentaient à elles seules 42,0 % de la SAU, soit 311 287 ha. Elles étaient suivies par le froment d’hiver (16,8 % de la SAU, soit 124 604 ha). Le maïs fourrager (7,8 %), les pommes de terre de conservation (5,2 %), les betteraves sucrières (4,9 %), les prairies temporaires (4,9 %) et l’escourgeon (2,9 %) étaient également présents mais dans une moindre mesure. L'évolution sur la période 1990 - 2021 de la superficie des principales productions végétales est particulièrement notable pour (i) les prairies permanentes, dont la superficie a régressé de 53 337 ha (- 14,6 %)[8], (ii) l'escourgeon et les betteraves sucrières, dont les superficies ont respectivement diminué de 33 057 ha (- 60,3 %) et de 32 462 ha (- 47,0 %) et (iii) les pommes de terre de conservation, dont la superficie a augmenté de 26 923 ha (+ 225,8 %). Les prairies temporaires ont quant à elles subi une évolution contrastée : les superficies enregistrées sur la période 2002 - 2014 étaient près de deux fois plus faibles que celles enregistrées sur la période 1992 - 2000 ; en 2021, celles-ci atteignaient un niveau intermédiaire de 36 437 ha. Bien que ces évolutions indiquent une baisse des affectations les moins impactantes (prairies permanentes) et une hausse des affectations les plus impactantes (pommes de terre), il est difficile d'en déterminer une tendance nette.
Grandes cultures au nord, prairies au sud
L’importance de l’agriculture par rapport aux autres utilisations du territoire varie selon les régions agricoles q ; il en va de même pour la nature des productions végétales. En 2021, la SAU couvrait quasiment deux tiers de la Région limoneuse (64,5 %), alors qu’elle couvrait environ la moitié du Condroz (51,0 %) et de la Région sablo-limoneuse (48,4 %). Au sud et à l’est de la Wallonie, ces proportions étaient plus faibles (entre 37,7 % pour la Fagne et 29,5 % pour la Région herbagère). En termes de superficie, la Région limoneuse présentait la SAU la plus élevée (258 849 ha), suivie du Condroz (129 472 ha) et de l’Ardenne (103 888 ha). Le nord de la Wallonie (Région sablo-limoneuse, Région limoneuse et Condroz) se caractérisait par une prédominance des grandes cultures (céréales, betteraves, pommes de terre, maïs…), alors que le sud et l’est étaient principalement occupés par des prairies permanentes.
Des mesures pour réduire l’impact environnemental de l'agriculture
Certains outils, mis en place en Wallonie suite à l’application de directives européennes, contribuent à une baisse des pressions et impacts de l'agriculture sur l'environnement. Il s'agit en particulier du Programme de gestion durable de l'azote en agriculture (PGDA) q, des Plans de gestion des districts hydrographiques (PGDH) q, du Programme wallon de réduction des pesticides (PWRP) q et du Plan air climat énergie (PACE) q. Par ailleurs, la conditionnalité des aides de la Politique agricole commune (PAC) impose des exigences réglementaires en matière de gestion et des normes relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales[9]. Enfin, le Programme wallon de développement rural (PwDR, application du 2ème pilier de la PAC) comprend le soutien à l'agriculture "bio" q, les paiements agro-environnementaux et climatiques q et les indemnités Natura 2000 q, mesures qui poursuivent toutes des objectifs environnementaux. Malgré cela, les impacts des activités agricoles subsistent, en particulier sur la qualité des ressources en eau q et sur la biodiversité en milieux agricoles[10]. Des mesures renforcées sont dès lors attendues pour la programmation 2023 - 2027 de la PAC.
[1] D’après les chiffres de Statbel (Office belge de statistique), cette dynamique est nettement moins marquée depuis 2011, une relative stagnation ayant même été observée au cours de la période 2013 - 2021. Cela s’explique en partie par l’amélioration du registre des entreprises agricoles de Statbel ainsi que par des changements méthodologiques survenus dans la collecte des données (utilisation croissante des bases de données administratives des Régions) et dans la définition d’entreprise agricole.
[2] À noter que la SAU n’a pas évolué de manière linéaire entre 1990 et 2021. Il est difficile d’évaluer quelle part de cette évolution peut être attribuée à la mise en œuvre de la Politique agricole commune (PAC) et de ses réformes (les agriculteurs ont été poussés à déclarer davantage de superficies utilisées dès 1993(a)), aux changements méthodologiques concernant la collecte et la gestion des données (à partir de 2011) ou à la réalité des faits.
[3] Dernière année pour laquelle des données sont disponibles
[4] L'agriculture wallonne reste aujourd'hui majoritairement conventionnelle et intensive comme dans les autres pays industrialisés. Principale alternative, l'agriculture "bio" concernait en 2021 15,5 % des exploitations wallonnes et couvrait 12,4 % de la SAU wallonne dont 72,9 % de prairies permanentes et temporaires et 22,5 % de grandes cultures. En agriculture "bio", la classification des productions selon leur impact potentiel sur l'environnement pourrait être différente.
[5] L’érosion est évaluée sur base de l’équation universelle des pertes en sol (USLE), qui fait intervenir cinq paramètres, dont le facteur C qui traduit le risque lié au type de culture et aux pratiques culturales(c).
[6] Choix des cultures et de leur ordre de succession sur une période donnée
[7] Culture intermédiaire piège à nitrate. Les CIPAN (moutarde, phacélie, ray-grass…) sont des cultures temporaires de plantes à croissance rapide qui s’intercalent généralement après une culture d’été et avant la culture de printemps suivante et évitent ainsi que les sols restent nus pendant l’hiver. Elles permettent d'absorber le nitrate présent dans le sol après la récolte et d'éviter les pertes par lixiviation durant l'automne/hiver. Le nitrate et les autres éléments prélevés par la CIPAN, lentement restitués au sol après sa destruction (par le gel, ou par broyage, labour... à partir du 15/11), sont disponibles pour la culture semée au printemps. Pour plus d’informations, consulter la page internet dédiée aux CIPAN sur le site internet de PROTECT’eau q
[8] À noter que la superficie des prairies permanentes est relativement stable depuis 2013.
[9] Pour plus d’informations, consulter la page internet dédiée à la conditionnalité sur le portail de l’agriculture wallonne q et la fiche d’indicateurs "Contrôle de la conditionnalité des aides agricoles" q
[10] Voir la fiche d'indicateurs "Évolution des populations d'oiseaux communs" q et l'infographie "Biodiversité" q
Évaluation
Évaluation de l'état non réalisable et évaluation de la tendance non réalisable
Pas de référentiel
Bien qu'une baisse des productions végétales les moins impactantes (prairies permanentes) et une hausse des productions végétales les plus impactantes (pommes de terre) soient observées sur la période 1990 - 2021, il est difficile de déterminer une tendance univoque de l'évolution des impacts de l'utilisation de l'espace agricole sur l'environnement.