La protection des eaux contre la pollution par le nitrate d’origine agricole est réglementée par la directive "nitrate" 91/676/CEE q. Celle-ci est mise en œuvre en Wallonie au moyen du Programme de gestion durable de l’azote en agriculture (PGDA), entré en vigueur fin 2002 et dont le 3ème programme d’actions est d’application depuis le 15/06/2014 (PGDA III).

Les principales mesures du programme

Les mesures du PGDA III q visent notamment :

  • le respect d’un équilibre du bilan d’azote organique (Norg) à l’échelle de l'exploitation agricole : chaque exploitation doit disposer de superficies de cultures et de prairies suffisantes pour épandre, sans risque pour les eaux souterraines, le Norg disponible sur une année ; cet équilibre est vérifié par le taux de liaison au sol (LS) ;
  • la désignation de zones vulnérables (ZV), dont les sols sont susceptibles d’alimenter en azote des masses d'eau déjà impactées, au sein desquelles des mesures particulières sont exigées : calcul d’un LS ZV sur base d’une norme d’épandage plus stricte en zones vulnérables, contrôle de l’azote potentiellement lessivable (APL), règles pour la couverture des sols nus (culture intermédiaire piège à nitrate ou CIPAN[1]) ou encore restrictions pour l’apport d’azote minéral sur sol en pente ;
  • l’établissement de règles concernant l’épandage des fertilisants azotés organiques et minéraux (périodes, conditions d'épandage, CIPAN) ;
  • l’établissement de conditions à respecter pour la destruction des prairies permanentes ;
  • l’établissement de contrats d’épandage en cas de transferts de Norg entre exploitations ;
  • la création d’infrastructures de stockage adaptées aux différents types d’effluents d’élevage ;
  • l’organisation de contrôles et la mise en place d’une structure d’encadrement (PROTECT’eau q).

Près de 60 % de la superficie agricole utilisée se trouve en zones vulnérables

La désignation de ZV se fonde sur la présence de nitrate en concentration trop élevée (> 50 mg/l) dans les eaux de surface q et souterraines q et/ou sur un risque que la situation se dégrade si des mesures adéquates ne sont pas prises. Les ZV comprennent le nord du sillon Sambre-et-Meuse, le Pays de Herve, le Sud Namurois et une grande partie du Condroz, soit près de 60 % de la superficie agricole utilisée.

Taux de liaison au sol respecté pour près de 98 % des exploitations

Le taux de liaison au sol (LS) correspond au rapport entre les quantités de Norg disponibles sur une année au sein d’une exploitation (production interne + importations – exportations d'effluents d'élevage)[2] et ses capacités d’épandage autorisées sur le territoire wallon. Le mode de calcul de ces capacités d'épandage détermine d’une part un LS global, calculé pour toutes les exploitations wallonnes, et d’autre part un LS ZV,  calculé pour les exploitations dont au moins une parcelle se trouve en zones vulnérables[3]. L’un comme l’autre ne peuvent dépasser la valeur de 1. En 2018, 98 % des exploitations respectaient ce critère, contre 94 % en 2008. À l’échelle communale, la proportion d’exploitations ne respectant pas ce critère atteignait au maximum 14 % en 2018. Les communes qui présentaient les valeurs moyennes de LS[4] les plus élevées, c'est-à-dire dont les exploitations exerçaient en moyenne une pression plus forte, étaient toutes situées en zones vulnérables.

Azote potentiellement lessivable (APL) : plus de 80 % des exploitations conformes

Au sein des zones vulnérables, des mesures de l’APL (kg N-NO3-/ha présent dans le sol en fin de saison agricole, entre le 15/10 et le 30/11) sont réalisées chaque année dans 5 % des exploitations choisies aléatoirement (soit près de 700 exploitations). Les exploitations sont déclarées conformes si (i) au moins deux des trois parcelles contrôlées présentent des valeurs d'APL inférieures aux limites de tolérance[5] et (ii) aucune des trois parcelles échantillonnées ne présente un dépassement de la limite de tolérance de plus de 100 % et de plus de 100 kg N-NO3-/ha. Sur la période 2014 - 2018, le taux de conformité des exploitations était compris entre 80 et 86 % selon les années. En moyenne sur la période, les taux de conformité des parcelles sous pommes de terre étaient les plus faibles (69 %), tandis que ceux des parcelles sous prairies étaient les plus élevés (97 %). En 2018, la sécheresse a entrainé une hausse de l'APL pour toutes les classes de culture du fait notamment de la baisse des prélèvements de N-NO3- par les plantes. Le grand nombre de recours acceptés (51) en a limité les répercussions sur le taux de conformité, qui a atteint 86 %.

Infrastructures de stockage : 95 % des exploitations conformes

Depuis le 01/01/2016, tout éleveur wallon[6] doit avoir introduit auprès du Service public de Wallonie (SPW ARNE) une demande d’attestation de conformité des infrastructures de stockage des effluents d’élevage (ACISEE). L'ACISEE, renouvelable tous les 5 ans, est délivrée après contrôle du respect des exigences du PGDA III lors d'une visite de l'exploitation. Le contrôle porte en particulier sur l'étanchéité et la capacité des infrastructures de stockage compte tenu du nombre d'animaux détenus. Ce contrôle a lieu dans un délai de 5 ans après l'introduction de la demande d'ACISEE. En juin 2018, 9 076 exploitations agricoles étaient concernées par ces dispositions du PGDA III. Entre juin 2013 et juin 2018, 7 524 exploitations ont été contrôlées, soit 83 % des exploitations concernées. Le taux de conformité s'élevait à 95 %. Parmi les 5 % non conformes, près des deux tiers l'étaient pour des motifs non structurels (fissure à colmater, déversoir d'orage mal réglé…).

En attente d'une révision du PGDA

La législation prévoit une révision du PGDA tous les 4 ans afin d’en améliorer l’efficacité. Des propositions de révision ont été formulées en 2017 sur base des observations de terrain(a). Le PGDA III aurait dû être révisé en 2018.


[1] Culture (moutarde, phacélie, avoine, ray-grass, seigle… en mélange ou non avec des légumineuses) permettant d'absorber le nitrate présent dans le sol et d'éviter les pertes par lixiviation durant l'automne/hiver

[2] En cas de production excédentaire d’effluents par rapport aux capacités d'épandage, le PGDA prévoit la possibilité de transferts entre exploitations (contrats d'épandage), de façon à rétablir l’équilibre. Ce type d’échanges permet aussi de mieux valoriser globalement les ressources en Norg. Le LS global et le LS ZV intègrent ces transferts (importations, exportations).

[3] Pour le calcul du LS global (toutes les exploitations wallonnes), les quantités de Norg épandables sont obtenues en multipliant les superficies (ha) de cultures et de prairies de l'exploitation par les normes d’épandage de 115 kg Norg/ha et 230 kg Norg/ha respectivement. Pour le calcul du LS ZV (exploitations dont au moins une parcelle se trouve en zones vulnérables), une norme moyenne (cultures et prairies) de 170 kg Norg/ha est utilisée pour la(les) parcelle(s) située(s) en zones vulnérables, les autres normes restant d'application pour les éventuelles parcelles situées hors zones vulnérables.

[4] Moyenne par commune des LS (le plus élevé entre LS global et LS ZV) des exploitations situées sur le territoire communal. La taille des exploitations n'a pas pu être prise en compte dans ce calcul. Elle devrait l'être pour une meilleure estimation des pressions.

[5] Les limites de tolérance sont établies chaque année pour 8 classes de cultures et prairies sur base de mesures d'APL effectuées dans plus de 250 parcelles d'une quarantaine d'exploitations agricoles de référence encadrées par Gembloux Agro-Bio Tech (ULiège) et ELIA (UCLouvain), membres scientifiques de PROTECT’eau. Ces exploitations mettent en œuvre les bonnes pratiques agricoles nécessaires à la protection des eaux contre la pollution par le nitrate à partir de sources agricoles, telles que définies par le PGDA.

[6] Exploitations produisant plus de 500 kg d'azote par an

Taux de liaison au sol (LS)* des exploitations agricoles en Wallonie

 

* Valeurs hors exploitations marginales (moins de 90 kg d'azote organique produit et importé), hors exploitations hors sol (LS infini) et hors exploitations non tenues de remplir une déclaration de superficie

Taux de liaison au sol (LS) des exploitations agricoles en Wallonie. Moyenne par commune (2018)

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* Valeur la plus élevée entre le LS global et le LS zones vulnérables, hors exploitations marginales (moins de 90 kg d'azote organique produit et importé), hors exploitations hors sol (LS infini) et hors exploitations non tenues de remplir une déclaration de superficie. La taille des exploitations n'est pas considérée dans le calcul de la moyenne.

Conformité des mesures d'azote potentiellement lessivable (APL) dans les sols agricoles situés en zones vulnérables en Wallonie. Taux de conformité des exploitations contrôlées

n = nombre d'exploitations contrôlées

 

Conformité des mesures d'azote potentiellement lessivable (APL) dans les sols agricoles situés en zones vulnérables en Wallonie. Taux de conformité des parcelles contrôlées

n = nombre de parcelles contrôlées, variable selon les années

 

Évaluation

2d1dc214-873d-4f41-8fe6-298735f34675 Etat légèrement défavorable et évaluation de la tendance non réalisable

Légèrement défavorable
  • Référentiel : directive "nitrate" 91/676/CEE q et obligations du Programme de gestion durable de l’azote en agriculture (PGDA III, AGW du 13/06/2014) q
  • En 2018, 98 % des exploitations agricoles concernées présentaient un taux de liaison au sol (LS) ≤ 1, et 86 % des exploitations situées en zones vulnérables étaient conformes du point de vue de l'azote potentiellement lessivable. Sur la période 2013 - 2018, 95 % des exploitations présentaient des infrastructures de stockage des effluents d'élevage conformes.
Évaluation non réalisable

Le taux de conformité pour le taux de liaison au sol est passé de 94 % à 98 % entre 2008 et 2018. Les données disponibles actuellement ne permettent pas de mettre en évidence une tendance pour la conformité en matière d'azote potentiellement lessivable et d'infrastructures de stockage.