Les méthodes agro-environnementales et climatiques (MAEC) visent à encourager la mise en œuvre par les agriculteurs de pratiques favorables à la conservation et à l’amélioration de l'environnement, au-delà de ce que leur impose la législation[1]. Ces pratiques, qui font l’objet d’un engagement volontaire pour 5 ans, donnent lieu à une rémunération pour couvrir le manque à gagner et les coûts liés à leur mise en œuvre.

Un élément clé de la politique de développement rural

Les MAEC s'inscrivent dans le Programme wallon de développement rural (PwDR) mettant en œuvre au niveau régional la politique de développement rural de l'UE[2], qui forme le 2ème pilier de la Politique agricole commune (PAC)[3]. Cofinancé par la Wallonie (390 millions d'euros) et l'UE (264 millions d'euros), le PwDR 2014 - 2020 q a réservé un budget de 147,5 millions d'euros (23 %) pour les paiements agro-environnementaux. L'encadrement technique du programme est assuré par Natagriwal q. Des partenaires scientifiques sont par ailleurs chargés de son évaluation et contribuent à son amélioration q. Les MAEC du PwDR 2014 - 2020 comprennent 6 "méthodes de base" et leurs variantes, applicables sans condition particulière, et 5 "méthodes ciblées" et leurs variantes, soumises à l'avis d'un conseiller de Natagriwal. Elles font l'objet de l'AGW du 03/09/2015 q exécuté par l'AM du 03/09/2015 q.

Des effets sur la biodiversité avant tout

Selon les termes du PwDR 2014 - 2020, les MAEC visent essentiellement à améliorer la qualité de l’eau, à améliorer la qualité des sols agricoles, à stopper le déclin de la biodiversité et à maintenir les paysages agricoles. Dans les faits, la capacité des MAEC à réduire les impacts de l'agriculture sur la qualité de l'eau (entrainement vers les masses d'eau d’engrais et de produits phytopharmaceutiques) et l'état des sols (érosion) est limitée. La lutte contre ces impacts passe en premier lieu par d'autres politiques plus normatives. Par contre, les MAEC apportent des réponses au déclin de la biodiversité en milieu agricole : des études réalisées en Wallonie montrent leurs effets sur la biodiversité locale(a) (b). Une proportion plus importante de superficies agricoles sous MAEC serait nécessaire pour obtenir des effets mesurables à l'échelle régionale, p. ex. via le Farmland Bird Index (FBI)[4].

Une reprise difficile après le moratoire de 2013

Le taux de participation des producteurs à au moins une MAE[5] atteignait 58 % en 2012, le plus haut niveau depuis leur lancement en 1995. Il a diminué ensuite, en raison notamment d'un moratoire sur l'accès aux méthodes de base en 2013 et 2014 et de la suppression de la MAE à succès "couverture du sol"[6]. En 2018, le taux de participation à au moins une MAEC s'élevait à 45 %. Il atteignait 40 % pour les méthodes de base et 15 % pour les méthodes ciblées. La MAEC "Haies et bandes boisées" présentait le taux de participation le plus élevé en 2012 (34 %, soit 5 148 producteurs engagés) et en 2018 (26 %, soit 3 345 producteurs engagés).

Le succès d'une MAEC dépend de plusieurs facteurs, en particulier :

  • l'attractivité de la rémunération par rapport au manque à gagner et aux coûts ;
  • la facilité de mise en œuvre ;
  • l'absence de frein imputable aux modalités de contrôle.

À titre d'exemple, la baisse d'adhésion à la MAEC "Haies et bandes boisées" peut être mise en lien avec une baisse de rémunération (réduite de moitié par rapport au PwDR 2007 - 2013) et des difficultés en matière de contrôle (imprécision et difficulté de validation du référentiel pour les haies, contrôles accrus), facteurs qui se sont ajoutés au moratoire de 2013 et 2014. À l'inverse, la variante "Récoltes laissées sur pied" (froment non récolté sur 10 % de la superficie cultivée) de la MAEC "Cultures favorables à l'environnement" progresse bien (doublement des superficies entre 2018 et 2019) en raison d'une rémunération devenue attractive, de sa facilité de mise en œuvre et de modalités de contrôle claires et univoques.

Le montant des rémunérations tient compte de la performance de la MAEC du point de vue environnemental. Dans le cas des haies, celle-ci peut être considérée comme limitée compte tenu de l'existence de mesures de protection des haies via le Code de développement territorial (CoDT)[7] et la conditionnalité[8]. À l’inverse, le froment non récolté apporte une plus-value considérable comme ressource hivernale aux oiseaux ou comme zone de refuge pour la petite faune des plaines agricoles.

Des taux de réalisation des objectifs variables à deux ans du terme du PwDR

Au 31/12/2018, les taux de réalisation des objectifs du PwDR 2014 - 2020 (TR) étaient inférieurs à 50 % pour les MAEC "Mares" (TR : 38 %), "Prairies inondables" (TR : 4 %), "Cultures favorables à l'environnement" (TR : 21 %) et "Parcelles aménagées" (TR : 8 %). Plusieurs mesures ont été prises pour améliorer la situation[9]. Les taux de réalisation des objectifs dépassaient 80 % pour les MAEC "Haies et bandes boisées", "Prairies naturelles", "Races locales menacées" et "Tournières enherbées".

 


[1] Les pratiques agricoles visées vont au-delà de celles déjà imposées via la conditionnalité des aides agricoles q, le Programme de gestion durable de l'azote en agriculture (PGDA) q ou le Programme wallon de réduction des pesticides (PwRP 2018 - 2022) q par exemple.

[2] Voir le Règlement (UE) n° 1305/2013 q

[3] Le 1er pilier, financé entièrement par l'UE, concerne le soutien des marchés et des revenus agricoles par un système d'aides aux agriculteurs. Certaines préoccupations environnementales sont déjà prises en compte à ce niveau : les paiements directs (paiement de base, paiement vert et paiement jeune agriculteur) sont conditionnés au respect de règles environnementales et de bien-être animal (conditionnalité). Le paiement vert est assorti de conditions supplémentaires : maintien d’un certain ratio de prairies permanentes (ratio calculé chaque année et appliqué à l’échelle de la Wallonie), diversification des cultures et présence de "surfaces d'intérêt écologique" (SIE) sur 5 % des terres arables (verdissement). Pour plus d’information sur la PAC, voir le site internet de la Commission européenne q.

[4] Pour plus d’information sur le FBI, voir Derouaux & Paquet (2018)(c)

[5] MAE jusque 2013, MAEC ensuite

[6] La plus-value environnementale de cette mesure était limitée compte tenu de l'existence d'une mesure obligatoire apparentée dans le PGDA III q.

[7] Art. D.IV.4.11.b) du CoDT q soumettant l'abattage des haies (notamment) à permis d'urbanisme

[8] Annexe II du règlement (UE) n° 1306/2013 q, norme "BCAE 7", comprenant le maintien des particularités topographiques, dont les haies, et l'interdiction de taille pendant la saison de reproduction des oiseaux

[9] Pour la MAEC "Mares", un appui spécifique a été mis en place. Pour la MAEC "Cultures favorables à l'environnement", la rémunération a été augmentée et des variantes ont été ajoutées pour élargir sa portée et son attractivité. Pour la MAEC "Parcelles aménagées", la rémunération a également été augmentée. La MAEC "Prairies inondables" s'avère quant à elle non opérationnelle (absence de financement des investissements pour les retenues d'eau).

Participation à au moins une méthode agro-environnementale et climatique (MAEC)* en Wallonie**

* Méthodes agro-environnementales (MAE) jusque 2013, MAEC ensuite
** Interpolation pour les années 1999, 2001, 2003 et 2014 (données non disponibles)
*** Par rapport au nombre total de producteurs wallons

Méthodes agro-environnementales et climatiques (MAEC)* en Wallonie. Participation des producteurs aux différentes méthodes**

* MAEC reprises dans l'AM du 03/09/2015 q
** Durée de l'engagement : 5 ans pour toutes les MAEC
*** Par rapport au nombre total de producteurs wallons

Méthodes agro-environnementales et climatiques (MAEC)* en Wallonie. Rémunération annuelle des producteurs** (2018) et objectifs du PwDR 2014 - 2020

Axe

MAEC

Type***

Rémunération
annuelle

Objectifs
du PwDR
2014-2020

Éléments du
maillage
écologique

MB1a

Haies et bandes boisées

Méthode
de base

25 €/200 m

13 500 km 

MB1b

Arbres, arbustes, buissons et bosquets
isolés, arbres fruitiers à haute tige

Méthode
de base

25 €/20 éléments

155 000 arbres

MB1c

Mares

Méthode
de base

100 €/mare

10 000 mares

Prairies

MB2

Prairies naturelles

Méthode
de base

200 €/ha

13 000 ha

MC3

Prairies inondables

Méthode
ciblée
200 €/ha

500 ha

MC4

Prairies de haute valeur biologique

Méthode
ciblée
450 €/ha

13 200 ha

Animaux

MC11

Races locales menacées

Méthode
ciblée

200 €/équin,
120 €/bovin,
30 €/ovin

10 500
animaux

Cultures

MB5

Tournières enherbées

Méthode
de base

1 000 €/ha
(24 €/tronçon de 20 m x 12 m)

2 650 ha

MB6

Cultures favorables à l'environnement

Méthode
de base

240 €/ha

4 250 ha

MC7

Parcelles aménagées

Méthode
ciblée

1 200 €/ha

1 000 ha

MC8

Bandes aménagées (4 variantes)

Méthode
ciblée
1 500 €/ha
(36 €/tronçon de 20 m x 12 m)
2 150 km

Approche globale
au niveau de
l'exploitation

MB9a

Autonomie fourragère,
variante max. 1,4 UGB/ha fourrager

Méthode
de base
120 €/ha
de prairie permanente
74 000 ha

MB9b

Autonomie fourragère
variante max. 1,8 UGB/ha fourrager
(hors zone vulnérable PGDA****)

Méthode
de base
60 €/ha
de prairie permanente

MC10

Plan d'action agro-environnemental Méthode
ciblée

Variable*****

20 000 ha

* MAEC reprises dans l'AM du 03/09/2015 q

** Durée de l'engagement : 5 ans pour toutes les MAEC

*** Les méthodes de base sont applicables sans condition particulière, les méthodes ciblées sont soumises à avis d'expert.

**** Programme de gestion durable de l'azote en agriculture q

***** Rémunération annuelle (€) = 20 X + 0,1 Y + 50 Z ; où X = superficie en ha (max. 50 ha) ; Y = rémunération annuelle totale des MAEC ; Z = superficie en ha contribuant à l'autonomie protéique

Méthodes agro-environnementales et climatiques (MAEC)* en Wallonie. Taux de réalisation des objectifs du PwDR 2014 - 2020 au 31/12/2018

* MAEC reprises dans l'AM du 03/09/2015 q

** Estimation de la superficie couverte sur base du nombre de plans d'action existants et de la superficie moyenne par plan

Évaluation

507368fa-efb4-4f8e-8dab-c0194d2a5bee Évaluation de l'état non réalisable et tendance à la détérioration

Évaluation non réalisable
  • Référentiel : objectifs du Programme wallon de développement rural (PwDR) 2014 - 2020 q
  • L'atteinte des objectifs du PwDR ne pourra être évaluée qu'au terme du programme, soit après le 31/12/2020. Les taux de réalisation des objectifs au 31/12/2018 suggèrent que plusieurs d'entre eux ne seront pas atteints.
En détérioration

Sur la période 2009 - 2018, période de 10 ans initiée sous le PwDR 2007 - 2013 et terminée sous le PwDR 2014 - 2020, le taux de participation des producteurs à au moins une MAEC est passé de 55 % à 45 %. Il s'est stabilisé entre 2017 et 2018.