L’artificialisation du territoire[1] à des fins résidentielles génère divers impacts environnementaux : consommation du sol en tant que ressource non renouvelable, disparition d’habitats (milieux naturels, forestiers, agricoles), imperméabilisation du sol… Cette artificialisation est augmentée par le développement corollaire des services et des équipements nécessaires aux ménages (voiries, trottoirs…).

Les terrains résidentiels progressent à un rythme moins soutenu depuis 2000

D’après les données cadastrales[2], au 01/01/2021, les terrains résidentiels (parcelles qui accueillent les logements, mais aussi leurs annexes bâties et non bâties(b)) occupaient 1 106 km2 (6,5 % du territoire wallon), contre 771 km2 en 1990 (4,6 %). En 31 ans, la superficie dédiée aux terrains résidentiels (SR) a donc augmenté de 335 km2 (+ 43,4 %), ce qui correspond à une croissance moyenne de 10,8 km2/an, soit 3,0 ha/jour. Depuis le début des années 2000, la croissance des terrains résidentiels tend toutefois à ralentir : alors qu’elle était encore de 14,0 km2 au cours de l’année 2000, elle oscillait entre 10,3 km2/an et 11,8 km2/an au cours de la période 2001 - 2010, puis entre 9,0 km2/an et 10,0 km2/an au cours de la période 2011 - 2013, pour finalement se situer entre 7,1 km2/an et 8,3 km2/an au cours de la période 2014 - 2020 q.
 

Superficie résidentielle en Wallonie

* Sur base de la situation de droit du Registre national


Les terrains résidentiels ne sont pas répartis de manière uniforme sur le territoire wallon. Les communes situées à proximité des pôles urbains existants et en particulier le long du sillon Haine-Sambre-Meuse et au nord de celui-ci affichent une part de superficie communale dédiée aux terrains résidentiels plus importante.

L’expansion des terrains résidentiels n’est quant à elle pas non plus uniforme. Entre 2011 et 2021, la croissance relative la plus forte est observée au sein de communes rurales éloignées des pôles existants et au sein desquelles l’utilisation du territoire pour la fonction résidentielle était minoritaire : Léglise (+ 26,2 %), La Roche-en-Ardenne (+ 24,5 %), Waimes (+ 24,1 %), Amblève (+ 24,0 %)…
 

Part de la superficie communale dédiée aux terrains résidentiels en Wallonie (2021)

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Évolution de la superficie résidentielle en Wallonie (2011 - 2021)

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La consommation en sol pour la fonction résidentielle devient plus efficiente

Sur la période 1990 - 2021, la population wallonne a progressé de 12,5 %. L’augmentation de 43,4 % de la SR n’est donc pas uniquement liée à la croissance de la population, mais également à la croissance du nombre de ménages privés[3] (+ 23,6 % entre 1990 et 2021)[4] et à une plus grande consommation moyenne en sol par ménage. Entre 1990 et 2021, la SR moyenne par ménage, c’est-à-dire le rapport entre la SR et le nombre de ménages, a augmenté de 16,0 %, passant de 595 m2/ménage à 691 m2/ménage. Depuis le début des années 2000, cette croissance tend toutefois à ralentir légèrement.

Deux dynamiques expliquent l’évolution de la SR moyenne par ménage. Tout d’abord, la production de logements neufs en Wallonie s’est fortement orientée ces dernières années vers la construction d’immeubles à appartements q, c’est-à-dire vers des logements moins consommateurs en sol. Une étude de la CPDT(c) a ainsi montré que la consommation moyenne en sol par logement supplémentaire[5] était en baisse constante sur la période 2002 - 2018. Elle est passée de 950 m2/logement produit en 2002 à 430 m2/logement produit en 2018, ce qui traduit une amélioration de l’efficience de la consommation en sol pour la fonction résidentielle. Cette amélioration est toutefois contrebalancée par une production de logements supérieure à la croissance du nombre de ménages. Le ratio entre le nombre de nouveaux logements produits et le nombre de nouveaux ménages est en effet devenu supérieur à 100 % à partir de 2005 et s’élevait en moyenne à près de 195 % sur la période 2010 - 2019(c). Cette surproduction de logements explique pourquoi la SR moyenne par ménage ne diminue pas. Différents facteurs peuvent expliquer cette dynamique : les logements vides (vacance immobilière résidentielle[6]), les résidences secondaires, des logiques d’investissements…(c)

De fortes disparités entre communes

En 2021, la SR moyenne par ménage variait considérablement entre les communes wallonnes (de 186 m2/ménage pour la commune de Liège à 2 037 m2/ménage pour la commune de Lasne), les communes des principales agglomérations urbaines se caractérisant par une urbanisation relativement dense.
 

Superficie résidentielle par ménage en Wallonie (2021)

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Entre 2011 et 2021, de nombreuses communes (113 sur 262) ont présenté une évolution favorable en termes de densification de l’habitat (évolution de la SR moyenne par ménage ≤ 0) q alors qu’une grande partie du territoire, surtout au sud et à l’est de la Wallonie, était toujours dans une dynamique de desserrement du résidentiel[7].
 

Évolution de la superficie résidentielle par ménage en Wallonie (2011 - 2021)

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Encourager une production de logements moins consommatrice en sol

À moyen et long termes, la population(e) et le nombre de ménages(f) vont continuer à croître en Wallonie. Ces perspectives feront croître la demande en logements[8]. Les politiques mises en œuvre en matière d’aménagement du territoire et de logement seront déterminantes par rapport aux impacts environnementaux liés à cette croissance. L’adoption d’objectifs chiffrés en matière de consommation en sol constitue ainsi une étape nécessaire pour maîtriser et évaluer la trajectoire de la Wallonie. Par ailleurs, dans une optique de consommation parcimonieuse du sol, certaines options devraient être privilégiées(b) : favoriser la reconstruction de la ville sur la ville, adopter une politique volontariste en matière de densité de logements sur les terrains vierges, remettre sur le marché les logements inoccupés, mettre à disposition des logements abordables pour tout ménage dans les sous-régions à forte pression foncière afin d’éviter une artificialisation accrue des zones à moindre pression (souvent plus rurales)…

Une révision des outils fiscaux, qui semblent conçus indépendamment des objectifs territoriaux, devrait également être envisagée (p. ex. une révision de la base de calcul du précompte immobilier étant donné qu’actuellement le revenu cadastral, qui constitue la base de cet impôt, ne favorise pas la réduction de l’artificialisation)(g).

En 2019, le Gouvernement wallon adoptait la révision du Schéma de développement du territoire q (SDT), outil de planification définissant la stratégie territoriale de la Wallonie. Ce document n’est toutefois jamais entré en vigueur et le Gouvernement a décidé en 2022 d’actualiser cette révision q. À titre indicatif, dans sa version adoptée en 2019, le SDT prévoyait de stopper à moyen terme l’artificialisation des terres, en réduisant la consommation des terres non artificialisées à 6 km2/an d’ici 2030 et en tendant vers 0 km2/an à l’horizon 2050. En matière de logement, il prévoyait notamment d’atteindre au minimum 50 % de logements construits sur des terres déjà artificialisées à partir de 2030 et 100 % à partir de 2050.


[1] L’artificialisation est le fait de soustraire des surfaces de leur état naturel, forestier ou agricole, qu’elles soient ensuite bâties ou non et revêtues (p. ex. parking) ou non (p. ex. jardin de maison pavillonnaire). Les surfaces artificialisées incluent donc également les espaces artificialisés non bâtis(a).

[2] Données issues de l’Administration générale de la documentation patrimoniale du Service public fédéral Finances

[3] Sur base de la situation de droit du Registre national

[4] L’augmentation du nombre de ménages privés est liée à la croissance de la population, mais également à la réduction de la taille des ménages (due à la diminution du nombre d’enfants par famille, aux unions plus fragiles entraînant l’augmentation de la monoparentalité…).

[5] Ratio entre la consommation foncière résidentielle annuelle et l’évolution du nombre de logements sur la même période

[6] La vacance immobilière résidentielle constitue une composante de la dynamique de l’offre et de la demande du marché immobilier lorsqu’elle s’inscrit dans une visée d’entretien ou de rénovation du bâti existant. Par contre, des logements inoccupés pendant une longue période représentent une ressource sous-utilisée, avec de multiples conséquences négatives, parmi lesquelles l’apparition de chancres urbains réduisant l’attractivité de la ville ou de la région et des difficultés pour garantir l’accès à un logement décent pour tous(d). La vacance immobilière résidentielle entraine en outre un report de la demande en logements vers de nouveaux logements.

[7] À noter que de nombreuses communes présentant une densification (évolution négative ou faible de leur SR moyenne par ménage) étaient des communes soumises à une forte pression foncière (pour plus d’informations, voir l’indicateur statistique "Prix immobiliers" sur le site internet de l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) q), traduisant ainsi l’impact du prix du foncier sur le mode de production de l’habitat.

[8] L’augmentation du nombre de ménages devrait s’accompagner d’une diminution de leur taille moyenne(f). Cette évolution pourrait ralentir la consommation en sol, étant donné le lien supposé entre la taille des ménages et la taille des logements.

Évaluation

507368fa-efb4-4f8e-8dab-c0194d2a5bee Évaluation de l'état non réalisable et tendance à la détérioration

Évaluation non réalisable

Pas de référentiel

En détérioration

Entre 1990 et 2021, la superficie dédiée aux terrains résidentiels a progressé de 43,4 %, alors que pendant la même période le nombre de ménages privés a progressé de 23,6 %. La superficie résidentielle moyenne par ménage a donc progressé (+ 16,0 %), mais cette croissance tend à s’atténuer depuis le début des années 2000.