Divers indicateurs permettent de rendre compte de l’état de la biodiversité en milieu forestier. Ils participent dès lors à l’évaluation du caractère durable de la gestion des forêts. De tels indicateurs ont été définis au niveau de la Conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe[1] ; certains sont calculés pour la forêt wallonne.

Diversité structurelle et spécifique des peuplements

De façon générale, une forêt diversifiée au niveau de sa structure (nombre d’étages de cimes, âge et circonférence des arbres…) et de sa composition en essences présente une meilleure stabilité et une résistance accrue aux stress climatiques et aux ravageurs, protège plus adéquatement les sols et offre une plus grande capacité d’accueil vis-à-vis de la flore et de la faune. Du point de vue de la structure, la forêt wallonne semble évoluer vers davantage d’irrégularisation. En effet, les futaies régulières (plantation, jeune futaie, futaie à un étage) et le taillis simple, qui concernaient 68 % de la surface forestière en 2001[2], en représentaient 55 % en 2014[3]. Parallèlement, les peuplements qui contiennent à la fois de la futaie et du taillis d’une part, et les futaies irrégulières et futaies à deux étages d’autre part, ont vu leurs proportions augmenter et passer de respectivement 23 % et 9 % de la forêt en 2001[2] à 28 % et 15 % en 2014[3].

En ce qui concerne la diversité spécifique, une amélioration est observée puisque la proportion de peuplements mono- ou bispécifiques est passée de 70 % en 2001[2] à 58 % en 2014[3].

Gros bois et bois mort

Les arbres de diamètre important, les arbres dépérissants et le bois mort constituent des habitats auxquels sont liées près d’¼ des espèces forestières(b).

Les arbres de diamètre important, vivants ou morts, sont préférentiellement utilisés par les pics pour le creusement de cavités. Ces cavités, de même que celles formées sous l’effet des champignons lignivores ou suite à la chute de branches, sont ensuite utilisées par de nombreuses espèces (chouettes, noctules, mustélidés ou coléoptères p. ex.). En 2014[3], près de 78 % des forêts feuillues inventoriées ne contenaient aucun gros bois[4] vivant. Cette proportion était de 82 % en 2001[2]. Le Code forestier q impose de maintenir au moins un arbre d’intérêt biologique (arbre de dimensions exceptionnelles[5] ou arbre à cavités) par superficie de deux hectares dans les forêts publiques ; en 2014[3], leur nombre[6] y était estimé à 1,53/2 ha, contre 0,96/2 ha en 2001[2].

Le bois mort permet le stockage temporaire du carbone. En outre, sous l’effet des espèces saproxyliques[7] qui l’habitent, il contribue au maintien de la fertilité et de la capacité de production des sols forestiers via le recyclage de la matière organique. Il soutient par conséquent la régénération naturelle des peuplements qui est présente dans 22 % des peuplements productifs inventoriés en Wallonie. Du point de vue de la conservation de la nature et indépendamment des autres fonctions dévolues à la forêt, le volume minimal de bois mort[8] permettant de préserver la majorité des espèces saproxyliques est de 30 m³/ha pour les forêts de basse altitude(c). En 2014[3], tous peuplements confondus, le volume de bois mort en forêt wallonne s’élevait en moyenne à 10,1 m³/ha (environ 4 % du volume total de bois vivant). Ce volume était de 8,2 m³/ha en 2003[9]. Le Code forestier q impose de réserver deux arbres morts[10] par hectare dans les forêts feuillues publiques ; en 2014[3], leur nombre y était estimé à 0,65/ha, contre 0,44/ha en 2003[9].

Diversité structurelle des lisières

Les lisières étagées, c’est-à-dire constituées des trois ceintures végétales typiques (manteau forestier, cordon de buissons et ourlet herbeux), jouent un rôle de protection des peuplements contre vents et maladies, offrent des habitats favorables et des couloirs de dispersion pour de nombreuses espèces et constituent des aires de gagnage pour les ongulés sauvages permettant de réduire la pression exercée par ces herbivores sur la forêt et les cultures. En 2014[3], les trois ceintures végétales étaient observées dans 41 % des points échantillonnés. Cette valeur était de 11 % en 2004[11]. En outre, la présence d’éléments tels que zones humides, plantes grimpantes, bois morts ou tas de pierres contribue à la diversification structurelle des lisières et en améliore la capacité d’accueil. En 2014[3], 12 % des points échantillonnés ne présentaient aucun de ces éléments, 59 % en comprenaient de 1 à 3 et 29 %, de 4 à 6. En 2004[11], ces proportions étaient respectivement de 13 %, 68 % et 19 %.

Diversité spécifique de la strate herbacée

La capacité d’accueil d’un peuplement est également améliorée par la richesse de la couverture herbacée. Appréciée des ongulés sauvages, celle-ci permet de limiter les dégâts causés par ces derniers aux essences forestières q. En 2014[3], moins de 7 espèces étaient recensées dans 37 % des points échantillonnés, 38 % des points échantillonnés en présentaient de 7 à 12, et 25 %, plus de 12. En 2001[2], ces proportions étaient de 72 %, 19 % et 9 %.

Ancienneté des forêts

Au même titre que la composition ou la structure des peuplements, l’ancienneté des forêts est un élément important de leur naturalité. Depuis le 18ème siècle, sur les 431 000 ha qu’occupaient les massifs forestiers feuillus, 30 % ont été déboisés pour l’agriculture et 26 % ont été transformés en plantations de résineux. Les 44 % restants ont été continuellement boisés depuis le 18ème siècle(d). Le Code forestier q impose l’identification de ces forêts historiques lors de la rédaction des plans d’aménagement forestiers q des propriétés publiques et précise que ces parcelles de forêts anciennes subnaturelles doivent bénéficier d’une vocation prioritaire de conservation afin de préserver les faciès caractéristiques, rares ou sensibles.

Orienter la gestion dans une optique de durabilité

Outre les éléments déjà cités, le Code forestier q fixe d’autres objectifs favorables à la biodiversité comme le choix d’essences adaptées aux conditions locales[12], la limitation des coupes à blanc, du drainage et des intrants ou l’interdiction d’utilisation de produits phytopharmaceutiques. Par ailleurs, dans sa Déclaration de politique régionale 2019 - 2024 q, le Gouvernement wallon s’engage à favoriser une gestion des forêts orientée vers la durabilité et la préservation de la biodiversité. Il entend notamment appuyer l’adaptation des forêts aux changements climatiques par leur diversification progressive et la protection des sols.

 


[1] Voir la liste des indicateurs sur le site internet de la Conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe (Forest Europeq et les dernières valeurs européennes disponibles dans le rapport State of Europe’s Forests 2020(a)

[2] L’année choisie pour référence (2001) constitue l’année centrale du 1er cycle de l’Inventaire permanent des ressources forestières de Wallonie (IPRFW) (1994 - 2008).

[3] L’année choisie pour référence (2014) constitue l’année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 - 2028).

[4] Circonférence minimale : chêne, 240 cm ; hêtre, 220 cm ; autres feuillus indigènes, 180 cm

[5] Diamètre minimal : hêtre et chêne, 80 cm ; frêne, érable, merisier et tilleul, 70 cm ; bouleau, aulne et charme, 50 cm ; autres feuillus indigènes, 40 cm

[6] Arbres de dimensions exceptionnelles uniquement, les arbres à cavités n’étant pas répertoriés dans le cadre de l’IPRFW

[7] Une espèce saproxylique dépend, pour une partie de son cycle de vie au moins, d’arbres morts ou en décomposition (champignons, mollusques, insectes ou oiseaux p. ex.).

[8] Y compris résidus d’exploitation ou parties dépéries d’arbres vivants

[9] L’année choisie pour référence (2003) constitue l’année centrale des campagnes de mesures effectuées de 1997 à 2008 dans le cadre du 1er cycle de l’IPRFW (1994 - 2008) (les mesures relatives au bois mort ont en effet débuté au cours du 1er cycle – plus précisément en 1997 – à la suite de l’intégration d’observations relatives à la biodiversité végétale et à la gestion durable).

[10] Diamètre supérieur à 40 cm

[11] L’année choisie pour référence (2004) constitue l’année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2001 à 2008 dans le cadre du 1er cycle de l’IPRFW (1994 - 2008) (les mesures relatives aux lisières ont en effet débuté au cours du 1er cycle – plus précisément en 2001 – à la suite de l’intégration d’observations relatives à la biodiversité végétale et à la gestion durable).

[12] Selon le fichier écologique des essences et le guide de boisement, fusionnés en un même outil cartographique q

Diversité structurelle des peuplements en forêt wallonne (2014*)

* Échantillon global de 4 657 points en zones forestières. L'année choisie pour référence (2014) constitue l'année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 – 2028).

Diversité spécifique des peuplements en forêt wallonne (2014*)

* Échantillon global de 4 699 points en zones forestières. L'année choisie pour référence (2014) constitue l'année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 – 2028).

Présence de gros bois* en forêt wallonne** (2014***)

* Circonférence minimale : chêne, 240 cm ; hêtre, 220 cm ; autres feuillus indigènes, 180 cm

** Uniquement peuplements feuillus sauf peupleraies

*** Échantillon global de 2 476 points en zones forestières. L'année choisie pour référence (2014) constitue l'année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 – 2028).

Présence de bois mort en forêt wallonne (2014*)

* Échantillon global de 4 803 points en zones forestières. L'année choisie pour référence (2014) constitue l'année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 – 2028).

Diversité structurelle des lisières en forêt wallonne (2014*)

* Échantillon global de 160 points en zones forestières (points avec présence d'une lisière). L'année choisie pour référence (2014) constitue l'année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 – 2028).

** Éléments constitutifs d'une lisière étagée : manteau forestier, cordon de buissons et ourlet herbeux

*** Exemples d'éléments de diversification : présence d'une zone humide, de tas de pierres, de bois mort... (7 et 8 éléments : 0 %)

Diversité spécifique de la strate herbacée en forêt wallonne (2014*)

* Échantillon global de 4 803 points en zones forestières. L'année choisie pour référence (2014) constitue l'année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 – 2028).

Évaluation

f064b92c-e44a-4368-8af4-41a8028a455c Etat défavorable et tendance à l'amélioration

Défavorable
  • Référentiel : décret du 15/07/2008 relatif au Code forestier (Art. 71) q - objectif de maintenir deux arbres morts ou chablis (d’un diamètre supérieur à 40 cm) par hectare en forêt feuillue publique ; objectif de maintenir au moins un arbre d’intérêt biologique (arbre de dimensions exceptionnelles ou arbre à cavités) par superficie de deux hectares en forêt publique. En l’absence d’objectif chiffré pour les autres indicateurs, l'évaluation se base sur ces deux objectifs.
  • En 2014 (année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’Inventaire permanent des ressources forestières de Wallonie (IPRFW) (2008 - 2028)), le nombre d’arbres morts ou chablis par hectare en forêt feuillue publique était estimé à 0,65. Le nombre d’arbres d’intérêt biologique par superficie de deux hectares en forêt publique (arbres de dimension exceptionnelle* uniquement, les arbres à cavités n’étant pas répertoriés par l’IPRFW) était estimé à 1,53.

    * Diamètre minimal : hêtre et chêne, 80 cm ; frêne, érable, merisier et tilleul, 70 cm ; bouleau, aulne et charme, 50 cm ; autres feuillus indigènes, 40 cm
En amélioration

Le nombre d’arbres morts par hectare en forêt feuillue publique est passé de 0,44 en 2003 (année centrale des campagnes de mesure effectuées de 1997 à 2008 dans le cadre du 1er cycle de l’IPRFW (1994 - 2008)) à 0,65 en 2014 (année centrale des campagnes de mesures effectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 - 2028)).

Le nombre d’arbres d’intérêt biologique par deux hectares en forêt publique est passé de 0,96 en 2001 (année centrale du 1er cycle de l’IPRFW (1994 - 2008)) à 1,53 en 2014 (année centrale des campagnes de mesures ffectuées de 2011 à 2018 dans le cadre du 2ème cycle de l’IPRFW (2008 - 2028)).